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Libert‚
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La Libert‚ guidant le peuple par EugŠne Delacroix (1830)(Mus‚e du Louvre, Paris)
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La Libert‚ guidant le peuple par EugŠne Delacroix (1830)(Mus‚e du Louvre, Paris)
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La libert‚ est une notion qui d‚signe d'une maniŠre n‚gative l'absence de soumission, de servitude et de d‚termination, c'est-…-dire qu'elle est une notion qui qualifie l'ind‚pendance de l'ˆtre humain. D'une maniŠre positive, elle d‚signe l'autonomie et la spontan‚it‚ d'un sujet rationnel, c'est-…-dire qu'elle qualifie les comportements humains volontaires et en constitue la condition.
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Cette notion est … la fois con‡ue comme une valeur abstraite et normative de l'action humaine et comme une r‚alit‚ concrŠte et v‚cue. Ces deux perspectives se recoupent de diverses maniŠres et peuvent provoquer des erreurs de cat‚gories. Il existe ainsi de nombreuses confusions possibles … propos du terme de libert‚. Il faut donc prendre soin de distinguer les diff‚rents sens de ce mot.
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La libert‚ peut constituer un attribut de l'ˆtre humain, de sa volont‚, et ˆtre la condition de droits naturels ou positifs, mais aussi de devoirs ; la r‚alisation effective de l'acte volontaire peut n‚anmoins comporter une dimension v‚cue que l'on ne saurait r‚duire … ce qui pr‚cŠde. Ces deux plans de l'existence humaine ne sont pas n‚cessairement compatibles : par exemple, l'existence des libert‚s juridiques est constatable, alors que la r‚alit‚ (son existence dans nos actes) et l'essence (la conception que nous nous en faisons) de la libert‚ posent problŠme.
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La Libert‚ ‚clairant le monde, dans le port de New York
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La Libert‚ ‚clairant le monde, dans le port de New York
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Le premier point peut faire l'objet d'une enquˆte socio-politique ; son fondement m‚taphysique et le second point concernent plus particuliŠrement le problŠme philosophique de la libert‚. Cet article sera donc divis‚ en deux parties pour en faciliter la lecture : une partie philosophique, traitant de ce qu'il y a de m‚taphysique dans la notion de libert‚, et une partie sociologique. Il faut cependant garder … l'esprit que les deux aspects se recoupent.
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Remarque : pour une introduction g‚n‚rale … cette notion, on peut lire du chapitre ® Un concept clef de la m‚taphysique ¯ … ® Les sens philosophiques fondamentaux du mot libert‚ ¯. Les chapitres suivants permettent d'approfondir la notion par la connaissance de ce que des philosophes en ont dit et par la diversit‚ des points de vue.
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Le concept de libert‚ en philosophie
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Un concept clef de la m‚taphysique
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La question de la libert‚ peut ˆtre consid‚r‚e comme une question m‚taphysique par excellence dans la mesure o— elle concerne le statut de l'homme au sein de la nature. La libert‚ qualifie en effet la relation de l'homme en tant qu'agent et du monde physique, relation notamment consid‚r‚e dans son rapport … un d‚terminisme suppos‚ ou r‚el. Cette question concerne donc particuliŠrement l'immanence et la transcendance de la volont‚ humaine par rapport au monde.
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La libert‚ s'oppose en g‚n‚ral (ce n'est donc pas toujours le cas) au d‚terminisme, au fatalisme et … toute doctrine qui soutient la thŠse de la n‚cessit‚ du devenir. Le concept de libert‚ divise trŠs sch‚matiquement les philosophes en deux camps : ceux qui en font le fondement de l'action et de la morale humaines (<28>picure, Descartes, Kant), et ceux qui nient une quelconque transcendance de la volont‚ par rapport … des d‚terminismes tels que la sensibilit‚ (D‚mocrite, Spinoza, Nietzsche) :
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® Il existait deux opinions sur lesquelles se partageaient les anciens philosophes, les uns pensant que tout se produit par le destin, en sorte que ce destin apportait la force de la n‚cessit‚ (D‚mocrite, H‚raclite, Emp‚docle, Aristote ‚taient de cet avis), les autres pour qui les mouvements volontaires de l'ƒme existaient sans aucune intervention du destin ; Chrysippe, en position d'arbitre officieux, me paraŒt avoir choisi la position interm‚diaire ; mais ils se rattache plut“t … ceux qui veulent voir les mouvements de l'ƒme lib‚r‚s de la n‚cessit‚. ¯ (Cic‚ron, Du destin, <20>39).
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On dirait aujourd'hui qu'il y a une opposition entre physicalisme et mentalisme, i.e. entre la causalit‚ physique (physicalisme) … laquelle tous les ˆtres peuvent ˆtre r‚duits et la causalit‚ mentale (mentalisme), qui peut ˆtre une th‚orie mat‚rialiste, tout en reconnaissant une action propre du mental. Dans le premier cas, il s'agit d'expliquer comment on peut naturaliser la volont‚, sans reconduire un dualisme m‚taphysique classique, et comment il est encore possible de parler d'action et de responsabilit‚, alors que l'on en a supprim‚ la condition ; dans le second cas, il s'agit plut“t d'expliquer comment une causalit‚ mentale est possible qui ‚vite aussi ce dualisme souvent difficile … rendre intelligible. Un des points les plus int‚ressants que met ainsi en lumiŠre cette opposition, c'est le caractŠre souvent difficile … d‚terminer du concept de libert‚.
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Origine et analyse du problŠme
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Le problŠme de la libert‚ surgit naturellement quand la raison humaine cherche … unifier les diff‚rents ‚l‚ments de sa repr‚sentation du monde. En effet, si l'explication philosophique comprend la r‚alit‚ dans son int‚gralit‚, au moins id‚alement (et au contraire des sciences qui ont une partie seulement du monde pour objet), alors un effort d'unification de notre connaissance par une causalit‚ unique est exigible, et cela afin d'‚viter les contradictions qui d‚coulent de l'hypothŠse de l'existence de plusieurs causalit‚s (psychique et physique) : il semble en effet impossible de penser l'interaction de deux causalit‚s h‚t‚rogŠnes. Ce problŠme a particuliŠrement sollicit‚ la r‚flexion des philosophes de l'antiquit‚. La physique hell‚nistique est ainsi nettement d‚terministe. Mais cette unit‚ causale a soulev‚ et soulŠve encore de nos jours des problŠmes : si on unit les trois parties de la connaissance (physique, ‚thique, logique), et aujourd'hui les sciences humaines et les sciences de la nature, comment r‚soudre l'antagonisme entre destin et libert‚ ? Le problŠme qui se pose est essentiellement d'ordre moral. Epicure fut contraint d'inventer le clinamen, et les sto‹ciens inventŠrent des raisonnements trŠs subtils pour tenter d'‚chapper … ce qui ressemble … une cons‚quence in‚vitable de ce qu'on appelle aujourd'hui le physicalisme.
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L'unit‚ de nos repr‚sentations serait alors une unit‚ logique. Mais la question se pose : si tout d‚pend du destin, comment certaines choses peuvent-elles encore d‚pendre de nous ? Ou bien la nature est seule maŒtresse des choses, ou bien l'homme est maŒtre lui aussi au sein de la nature. Cette contradiction dans notre connaissance est la troisiŠme antinomie kantienne : suis-je libre, ou suis-je conduit par le destin ? La nature est ici entendue comme un pur enchaŒnement causal ; il s'agit alors de concilier les deux affirmations : responsabilit‚ morale et actes d‚termin‚s.
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Si on nie la causalit‚ naturelle, on fait apparaŒtre un concept de libert‚ qui implique la nouveaut‚ absolue dans l'ordre de la nature : la libert‚ humaine doit pouvoir ouvrir des possibles en produisant des actions non-d‚termin‚es, ind‚pendantes notamment des inclinations de notre sensibilit‚. Notre volont‚ n'a alors aucune cause ant‚c‚dente. Mais dans ce cas, la libert‚ n'est pas une r‚alit‚ intelligible : la libert‚ sort du n‚ant, elle constitue une sorte de miracle, d'o— le caractŠre presque indicible de ce concept, puisque la libert‚ semble ˆtre dans ce cas au-del… de la port‚e de l'intellect humain.
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Ainsi, en cherchant … unifier nos connaissances, soit on fait de l'homme un ˆtre d‚termin‚, dont la volont‚ est immanente … la nature (donc on cherche … naturaliser l'humain), soit on fait de l'homme un ˆtre transcendant, irr‚ductible en particulier … sa nature animale.
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D‚finition et critiques
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Une d‚finition du sens commun serait que la libert‚ c'est faire ce qu'on d‚sire sans rencontrer d'obstacle. C'est l'absence de contrainte et l'ind‚pendance, comme, par exemple, le vagabond non assujetti … un ordre social (Arthur Rimbaud, Jack Kerouac, etc). Carmen, dit, dans l'op‚ra (musique) de Georges Bizet : ® Ce que je veux, c'est ˆtre libre et faire ce qui me plaŒt ¯, ® avoir pour pays l'univers et pour loi sa volont‚ ¯.
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C'est l'ivresse de la libert‚ :
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* un certain sentiment de libert‚ peut accompagner l'acte volontaire, et mˆme lorsque l'action est empˆch‚e, il nous reste le sentiment que c'est nous qui d‚cidons de la direction de notre volont‚ ;
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* le sentiment de la libert‚ peut naŒtre de l'allŠgement des contraintes sociales, par exemple dans le temps festif (consommation excessive, d‚mesur‚e), par opposition au temps ouvr‚ (travail et production). La hi‚rarchie sociale est renvers‚e, comme dans les saturnales ou le carnaval.
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Mais cette libert‚ n'est pas la libert‚ au sens philosophique.
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En effet, contre la libert‚ ind‚pendance, il existe au moins deux types de critiques :
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* une critique moraliste : cette libert‚ relŠve de la licence, i.e. de l'abandon au d‚sir. Or, il n'y a pas de libert‚ sans loi (Rousseau, Emmanuel Kant), car la libert‚ de tous serait en ce sens contradictoire : les d‚sirs universalis‚s s'annuleraient. La loi est donc n‚cessaire et il faut limiter l'extension de la libert‚ pour garantir son exercice. Ces limites sont dans l'int‚rˆt mˆme de la libert‚, pour ‚viter la tyrannie, les conflits et l'esclavage :
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® On pourrait, sur ce qui pr‚cŠde, ajouter … l'acquis de l'‚tat civil la libert‚ morale qui seule rend l'homme vraiment maŒtre de lui; car l'impulsion du seul app‚tit est esclavage, et l'ob‚issance … la loi qu'on s'est prescrite est libert‚. ¯ (Rousseau, Le contrat social).
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On remarque que dans cette conception philosophique de la libert‚, les limites ne sont pas des limites contraignant la libert‚ de la volont‚ humaine ; ces limites d‚finissent en r‚alit‚ un domaine d'action o— la libert‚ peut exister, ce qui est tout autre chose.
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* une critique d‚terministe : s'abandonner … ses d‚sirs, n'est-ce pas leur ob‚ir, et dŠs lors un tel abandon ne relŠve-t-il pas d'une forme d‚guis‚e de d‚terminisme ? Nous serions alors victimes d'une illusion de libre arbitre : nous aurions une fausse conscience de la libert‚ de notre volont‚ parce que nous ignorons les v‚ritables causes qui nous font agir. Ainsi, Spinoza ‚crit dans L'Ethique :
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® Telle est cette libert‚ humaine que tous se vantent de poss‚der et qui consiste en cela seul que les hommes ont conscience de leurs app‚tits et ignorent les causes qui les d‚terminent. Un enfant croit librement app‚ter le lait, un jeune gar‡on irrit‚ vouloir se venger et, s'il est poltron, vouloir fuir. Un ivrogne croit dire par un libre d‚cret de son ƒme ce qu'ensuite, revenu … la sobri‚t‚, il aurait voulu taire. De mˆme un d‚lirant, un bavard, et bien d'autres de mˆme farine, croient agir par un libre d‚cret de l'ƒme et non se laisser contraindre ¯.
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Nietzsche reprendra cette critique : '® Aussi longtemps que nous ne nous sentons pas d‚pendre de quoi que ce soit, nous nous estimons ind‚pendants : sophisme qui montre combien l'homme est orgueilleux et despotique. Car il admet ici qu'en toutes circonstances il remarquerait et reconnaŒtrait sa d‚pendance dŠs qu'il la subirait, son postulat ‚tant qu'il vit habituellement dans l'ind‚pendance et qu'il ‚prouverait aussit“t une contradiction dans ses sentiments s'il venait exceptionnellement … la perdre. ¯
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Ces deux critiques mettent en lumiŠre plusieurs points importants. En premier lieu, la libert‚ ne peut se r‚duire … l'ind‚pendance par rapport au monde ext‚rieur ; il faut ‚galement une autonomie int‚rieure r‚elle par laquelle nous nous donnons volontairement des rŠgles d'actions. Ainsi, alors que l'ind‚pendance concerne les causes externes (d‚finissant ce que je peux), l'autonomie concerne les causes qui sont la source de la volont‚ (d‚finissant ce que je veux). La r‚flexion philosophique int‚riorise le problŠme et cherche … en trouver les conditions internes, en niant que la libert‚ soit d‚pendante en quoi que ce soit du monde ext‚rieur.
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En second lieu, il n'est pas certain que tout lien soit contraire … l'ind‚pendance. ’tre reli‚ n'est pas toujours n‚gatif, car l'intersubjectivit‚ est peut-ˆtre plus fondamentale que l'ind‚pendance du moi, dans la mesure o— le moi est relation aux autres. Ainsi, pour Friedrich Nietzsche (et de mˆme pour Hegel), le toi est ant‚rieur au moi. Il ne semble donc pas possible de concevoir une libert‚ ind‚pendance comme un ‚tat monadique, o— l'individu serait une totalit‚ ferm‚e, atome qui n'aurait que des relations qui lui seraient ext‚rieures ou ‚trangŠres. Les relations humaines seraient donc … la fois des sources de conflits et d'ali‚nation, et des conditions de libert‚ sociale et politique.
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Les sens philosophiques fondamentaux du mot libert‚
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Pour faciliter l'exposition et la compr‚hension du problŠme philosophique de la libert‚, il est commode de partir de quelques modŠles fondamentaux, modŠles qui sont soit des conceptions majeures, soit des moments importants de l'histoire de la pens‚e occidentale (cette liste n'est donc pas ferm‚e) :
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1. La libert‚ comme libre arbitre de la volont‚ ;
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2. La libert‚ d'indiff‚rence ;
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3. La libert‚ transcendantale ;
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4. La libert‚ morale ;
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5. La libert‚ jaillissement ;
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6. La libert‚ existentielle.
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1. Libre arbitre: propri‚t‚ de la volont‚ (actus proprius), facult‚ de choix qui associe raison et volont‚. C'est l'union de la spontan‚it‚ et de l'intelligence.
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* Spontan‚it‚ : c'est le fait de trouver … l'int‚rieur de soi le principe de ses mouvements. Tous les animaux (en tant que mus par de d‚sirs internes) sont en ce sens des ˆtres anim‚s de maniŠre spontan‚e.
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* Intelligence : par l'intelligence, facult‚ de choix, nous agissons par nous-mˆme en connaissance de cause ; nous avons un discernement de nos actes.
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La libert‚, c'est donc la spontan‚it‚ ‚clair‚e par la raison ; cette conception de la libert‚ n'est pas incompatible avec certaines formes de naturalisme.
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2. Libert‚ d'indiff‚rence (voir Libre arbitre)
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* Selon Descartes, c'est ® le plus bas degr‚ de la libert‚ ¯.
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3. Libert‚ transcendantale : c'est la facult‚ par laquelle l'individu peut disposer de lui-mˆme et d‚terminer sa volont‚ en l'absence de toute contrainte physique, c'est-…-dire ind‚pendamment de la causalit‚ naturelle (chez Kant par exemple). Est dit libre l'homme qui se gouverne selon sa raison. Cela sous-entend que l'individu doit ˆtre en mesure de faire preuve de discernement et d'un grand sens critique : l'homme libre se donne … lui-mˆme des normes cognitives.
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Cette libert‚ a deux conditions : l'ind‚pendance et la spontan‚it‚.
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* Ind‚pendance: notre arbitre est ind‚pendant … l'‚gard des contraintes des penchants de la sensibilit‚. Si l'homme est affect‚ par des penchants qui inclinent son arbitre, il peut les mettre de c“t‚, les suspendre, pour agir d'aprŠs d'autres motifs issus de la raison. Dans ce cas, l'arbitre et la raison transcendent le monde en d‚passant la sensibilit‚. C'est une condition fondamentale de la libert‚ : l'activit‚ de la volont‚ met en cause la passivit‚ de notre rapport sensible au monde.
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* Spontan‚it‚ de la raison : c'est la facult‚ de cr‚er du nouveau, d'ouvrir des possibles : la raison permet de poser un acte non d‚termin‚ par des causes pass‚es. Il y a alors invention et surgissement de nouveaut‚. Dans ce cas, la raison se donne … elle-mˆme sa loi, elle l‚gifŠre sans rien emprunter … la nature.
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Si cette libert‚ existe, alors il y a une diff‚rence radicale entre l'homme et la nature.
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(snip)
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